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La bioéthique un débat démocratique sur des questions sociétales

Jean-François Delfraissy, Président du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) et Emanuel Loeb, psychiatre et Président de l’Intersyndicale nationale des chefs de clinique (ISNCCA), ont débattu le 25 mai lors des Contrepoints de la santé, sur la bioéthique, alors que les états généraux viennent de prendre fin.

Par Laure Martin.

LaureMartin

« C’est la première fois que le CCNE organise des états généraux de la bioéthique, a fait savoir Jean-François Delfraissy, lors des Contrepoints de la santé. La révision de la loi tous les sept à huit ans est une pratique française. Personnellement, je n’étais pas très enthousiaste à cette large consultation publique. Finalement, elle s’inscrit dans le cadre de la démocratie sanitaire et permet d’interroger les Français sur ces questions. Car si nous demandons uniquement l’avis des politiques, des médecins et des soignants, cela ne va pas aller. »

"Les consultations publiques  ont révélé une certaine
forme d'appétence de réflexion autour de la bioéthique"

Quatre modes de consultations ont été déployés : les débats en région, le site Internet, les auditions – environ 150 associations, sociétés savantes, religieux –  et un comité citoyen composé de 11 hommes et 11 femmes réunis sur trois mois, qui ont apporté leur regard sur le processus. « Tous les outils peuvent être critiqués », a reconnu Jean-François Delfraissy, expliquant que le site Internet avait été colonisé par les anti-Procréation médicalement assistée (PMA). Mais la conjonction des différents outils permet de trouver des solutions. « Cette méthode a permis de révéler une certaine forme d’appétence et de réflexion autour de la bioéthique », a-t-il ajouté, soulignant néanmoins que l’engagement des professionnels de santé au niveau individuel a été relativement faible.

Sensibiliser les professionnels

« Nous n’avons pas de temps intellect disponible pour pouvoir se poser ce genre de question alors que nous sommes les premiers impactés, a souligné Emanuel Loeb. La sensibilisation à l’éthique médicale commence à être intégrée dans le cursus. Mais pour le moment, il n’est pas encore possible de développer un double cursus avec d’un côté des études de médecine et de l’autre des études sur les compétences éthiques ou philosophiques. Pour les jeunes professionnels, il est alors difficile de prendre le temps nécessaire à la réflexion. » Le psychiatre s’est dit surpris par les deux principaux débats qui sont ressortis des états généraux de la bioéthique à savoir la fin de vie et la PMA, qui ne sont pas des questions de médecine mais de société.

Les thématiques

C’est le CCNE qui a fixé le périmètre des états généraux. Il a d’ailleurs rendu son rapport de synthèse sur ce travail le 5 juin. Puis, il rendra son propre avis en septembre, afin de participer à la construction politique de la révision de la loi.
Est-ce que certaines thématiques intéressent plus les jeunes médecins que d’autres ? Concernant la Gestation pour autrui (GPA), la PMA ou encore la fin de vie, « chaque professionnel est aussi citoyen et fait des choix en sa propre conscience, il n’y a donc pas d’homogénéité au sein de la jeune génération comme c’est le cas aussi au sein de la société », a expliqué Emanuel Loeb. En revanche, dans la pratique du métier au quotidien, les questions du premier recours, de l’organisation des soins et de l’accès aux bases de données vont réellement impacter la pratique médicale en santé. Les professionnels de santé vont devoir se saisir de ces nouvelles technologies.

"l’équilibre est difficile à trouve entre les avancées scientifiques
et technologiques majeures et la société qui évolue"

 

En bioéthique, « l’équilibre est difficile à trouve entre les avancées scientifiques et technologiques majeures et la société qui évolue, a indiqué Jean-François Delfraissy. Comment relier ces avancées scientifiques avec les avancées sociétales et comment parvenir à trouver un équilibre entre les deux ? C’est cela la vision de la bioéthique en 2018, et il faut toujours tenir compte du patient. »

 

par Laure Martin

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