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CPTS  : quel déploiement au sein des territoires ? 

La 1ère journée de la Fédération des Communautés professionnelles territoriales de santé (FCPTS) s’est déroulée le 23 octobre dernier au ministère de la Santé. L’occasion pour les professionnels de santé d’évoquer ce nouveau mode d’organisation territoriale. 

Par Laure Martin.

LaureMartin

« Nous avons voulu faire des CPTS un maillon fort de nos politiques, a souligné Thomas Mesnierdéputé de Charente (La République en Marche), lors de cette première journée de la FCPTS. Avec elles, nous voulons construire une offre de soins en proximité et en pluriprofessionnalité. » Créées par la loi de modernisation de notre système de santé de 2016, les CPTS ont vocation à contribuer à la meilleure prise en charge des patients. Elles sont un mode d’organisation permettant aux professionnels de santé de  se regrouper sur un même territoire, autour d’un projet médical et médico-social commun. Les établissements hospitaliers ou encore le secteur social et médico-social peuvent aussi s’y rassembler. Les CPTS devraient se multiplier dans les années à venir afin de mailler l’intégralité du territoire, l’objectif gouvernemental étant fixé à 1000 CPTS pour 2022. En septembre 2019, 400 projets de CPTS étaient recensés, couvrant 16 millions d’habitants. « En ambulatoire, pour déployer les CPTS, il faut déjà "faire communauté" et dans le champ libéral, ce n’est pas naturel », a rappelé Claude Leicher, médecin généraliste et président de la FCPTS.« Les CPTS offrent un décloisonnement des exercices,ajoutéThomas Mesnier. Elles vont permettre de mieux organiser les soins dans les territoires et de travailler avec les hôpitaux de proximité.  Alors qu’on vit une crise de l’hôpital et des urgences, les professionnels de santé libéraux sont le renouveau des soins primaires, la solution. Ils doivent répondre à des enjeux de mobilisation entre eux. » Ce qui implique l’émergence de leaders pour couvrir l’ensemble du territoire.  

Alors qu’on vit une crise de l’hôpital et des urgences, les professionnels de santé libéraux sont le renouveau des soins primaires, la solution. Ils doivent répondre à des enjeux de mobilisation entre eux.

Les missions  

Trois missions socles sont reconnues au CPTS :

  • faciliter l’accès aux soins,
  • organiser le parcours de santé
  • faire de la prévention.

Des missions complémentaires peuvent également être financées. « Les professionnels de santé organisés en CPTS se sont emparés de nombreuses missions », a indiqué Jean-Philippe Brégère, pharmacien et trésorier de la FCPTS. Parmi celles qu’ils se sont le plus appropriés : développer les outils de communication pour permettre un échange entre eux ainsi qu’avec les acteurs sociaux et médico-sociaux du territoire. Autres missions : la vaccination, la prise en charge des personnes âgées, le dépistage du cancer ou encore les soins non-programmés.

Des missions annexes ont également été identifiées comme l’accueil des étudiants, la télémédecine, les relations avec le médico-social. «  95.97 % des CPTS ont défini dans leur mission la sortie hospitalière,précisé Jean-Philippe Brégère. Le chiffre est éloquent. Lorsqu’on travaille sur le territoire, la sortie hospitalière fait l’unanimité. » « Depuis longtemps les hôpitaux avaient des demandes tout comme les professionnels de santé de ville, mais nous n’avions pas de lieu de rencontre »a rappelé Claude Leicher. « Maintenant, nous en avons un. Nous sommes devant une révolution organisationnelle de l’ambulatoire. La dynamique de travail est puissante. » 

« Si nous ne travaillons pas en bonne articulation avec le social, cela va être difficile » Claude Leicher

Créer du lien 

Les CPTS sont des structures qui visent aussi à donner une légitimité pour porter la parole des professionnels de santé en relation avec les hôpitaux, ainsi qu’avec le secteur social et médico-social. « Si nous ne travaillons pas en bonne articulation avec le social, cela va être difficile »a soutenu Claude Leicher« Nous attendons de l’organisation de l’offre de soins en ville du lien avec les Groupements hospitaliers de territoire (GHT),fait savoir Katia Julienne, directrice de l’offre de soins (DGOS). Cette articulation entre l’hôpital et la ville fait explicitement partie des missions des CPTS.»

La DGOS estime avoir fait preuve de sobriété en termes d’encadrement juridique. Elle a donné le cap, charge désormais aux professionnels de santé de s’organiser tout en étant accompagnés par les Agences régionales de santé (ARS). D’ailleurs, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2020, une mesure est débattue sur le financement des hôpitaux de proximité afin qu’ils disposent d’une dotation pour financer leur lien avec les CPTS. « Cette mesure est importante afin de renforcer les liens »a indiqué Katia Julienne. « Les travaux sur la gouvernance continuent car elle ne doit pas être strictement hospitalière. C’est un point très important pour nouer et structurer le lien. » Les CPTS ont également vocation à rendre attractif les territoires notamment pour attirer les jeunes professionnels soignants, et améliorer la qualité des pratiques.

Évolution des financements 

Pour permettre ce maillage du territoire et, de fait, le développement massif de la coordination des soins en ville, le financement des CPTS a évolué avec la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santéadoptée en juillet 2019. En parallèle, dans son article 42, la loi de financement de la sécurité sociale 2019 a imposé la négociation d’un accord cadre interprofessionnel (ACI) pour le financement et le développement des CPTS. Il a été signé le 20 juin entre l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam) et les syndicats représentatifs. Si jusqu’à présent, le fonds d’intervention régional (FIR) finançait les structures, désormais, en cas de validation du projet de santé de la CPTS par l’ARS, un financement non fléché compris entre 185 000 et 380 000 euros par an sera attribué. « Les financements sont plus importants qu’avec le FIR », a souligné Rebeca Martin Osuna, kinésithérapeute et secrétaire de la Fédération des CPTS (FCPST). « D’après notre enquête, avec le FIR, la moyenne nationale de financement des CPTS était de 151 958 euros par an. L’ACI va améliorer le quotidien avec un financement un peu plus important. » 

« En voulant une construction dans la durée et sécuriser les financements des CPTS, nous avons choisi le cadre conventionnel, a fait savoir Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale de l’assurance maladieCe cadre conventionnel est innovant, sobre et renvoie à chaque porteur de projet, des questions sur l’accès aux soins et sur les parcours. Chaque territoire est amené à construire son modèle, avec un contrat par CPTS comprenant des éléments propres et spécifiques à chacune, en lien avec l’ARS. » Selon Nicolas Revelles CPTS ne fonctionneront que si elles permettent une meilleure prise en charge quotidienne des patients et facilitent le travail des professionnels de santé.  

Trois points de vigilance selon le directeur général de la Cnamest ce que le territoire d’élaboration de la CPTS a un sens ? Il ne doit être ni trop grand, ni trop petit. Est-ce que les porteurs du projet sont dans une composition, un équipage qui leur permettra de fédérer ? Enfin, « nous ne voulons pas des projets de santé faisant 400 pages, a-t-il rappelé. Certes, il faut vérifier l’état d’esprit des porteurs de projet afin de s’assurer qu’ils ont bien perçu les enjeux dans la durée. » Mais il n’est pas nécessaire d’attendre que le projet soit élaboré dans les moindres détails pour être lancés.

Enfin, Nicolas Revel a rappelé qu’en dehors de l’ACI, un financement spécifique d’une ARS pour une mission spécifique a vocation à être maintenu. « Nous sommes prêts à financer des projets surnuméraires par rapport à l’ACI à condition qu’ils soient dans la logique du projet régional de santé », a fait savoir Pierre  Ouanhnon, directeur du Pôle ambulatoire et services aux professionnels de santé à l’ARS Ile-de-FranceIl insiste aussi sur l’importance de la communication et de l’accompagnement des professionnels de santé, deux aspects majeurs pour les équipes territoriales. « L’ARS travaille en lien étroit avec l’Assurance maladie pour communiquer et accompagner les professionnels. Cela concerne aussi bien des équipes qui veulent se créer avec des leaders, que les professionnels qui s’interrogent sur la mise en place de CPTS sur leur territoire », a conclu PierreOuanhnon.

 
par Laure Martin

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