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Médecin généraliste : être maître de stage

La possibilité pour les étudiants de faire des stages de médecine générale en ambulatoire ne date pas d’hier. Obligatoires en internat depuis 1997 et en externat depuis 2006, il s’agit d’un bon moyen pour découvrir la médecine générale de premier recours. Ces stages doivent être effectués auprès d’un médecin généraliste libéral agréé. Pour ce faire, il doit recevoir l’agrément de l’Agence régionale de santé (ARS) sur proposition des facultés de médecine.

« Un praticien qui souhaite devenir maître de stage doit se rapprocher de la faculté ou du collège des médecins généralistes enseignants pour en connaître les modalités qui peuvent varier selon les facultés », explique le Dr Corinne Perdrix, secrétaire générale adjointe du Collège national des généralistes enseignants. Néanmoins, les caractéristiques sont sensiblement similaires : il ne doit pas avoir été condamné par l’Ordre des médecins, il doit exercer une médecine générale majoritairement allopathique, avoir une activité professionnelle « raisonnable » afin de pouvoir consacrer du temps à la formation des stagiaires, suivre des programmes de formation médicale continue et se former à la pédagogie pour encadrer les étudiants en stage. 

La formation des médecins

La formation à la maîtrise de stage a longtemps été indemnisée dans le cadre du Développement professionnel continu (DPC) « hors quota ». Si auparavant les médecins pouvaient bénéficier de deux jours (14h) par an de formation en « hors quota », aujourd’hui, le nombre d’heures de formation est limité à sept par an. « Ce n’est pas suffisant car la formation pour être maître de stage pour les externes est certes de deux jours, précise le Dr Perdrix. Mais pour les internes, il faut compter deux jours par séminaires et il y en a quatre : initiation, supervision directe, supervision indirecte et évaluation. De fait, les médecins ne peuvent pas se former correctement, ce qui explique le manque de maîtres de stage. » Au 1er janvier 2016, ils étaient 8550, pour les 10 803 étudiants en DES de médecine générale. « Il en faudrait 4 000 de plus, ajoute le Dr Perdrix. L’enjeu est grand car si l’on veut recruter des formateurs et ainsi permettre aux jeunes médecins de choisir médecine générale et de l’exercer ensuite en s’installant, il faut que le DPC ”hors quota” perdure. »

Les différents types de stages

Pour accueillir des externes en stage, le médecin généraliste doit avoir exercé pendant un an, et pour recevoir les internes, il doit avoir au moins trois ans d’exercice à son actif. Le remplacement est comptabilisé dans la pratique, mais il faut être installé. « Aujourd’hui, le stage en ambulatoire pendant l’externat est obligatoire par décret, souligne Corinne Perdrix. Mais il n’y a pas suffisamment de stages organisés dans toutes les facultés. Seuls 66 % des étudiants effectuent réellement ce stage » d’une durée de trois mois à mi-temps ou six semaines à temps plein. Ce stage est une occasion de faire découvrir la médecine générale à un externe afin qu’il appréhende les spécificités de cette spécialité. Il observe et apprend l’examen clinique aux côtés du maître de stage, il est sensibilisé à la relation médecin-patient, au rôle de médecin de famille et découvre l’approche globale centrée sur le patient. « Les externes ne sont pas en autonomie car ils sont en construction de connaissances et de savoir-faire, rapporte le Dr Corinne Perdrix. La consultation se fait donc à deux. »

En internat, les étudiants peuvent effectuer deux types de stages. Le stage de niveau 1, d’une durée de six mois, qui se fait actuellement entre le deuxième et le cinquième semestre, mais qui, avec la réforme du troisième cycle se fera au premier ou deuxième semestre « afin que l’étudiant soit exposé le plus précocement possible à son futur métier », indique le Dr Perdrix. L’objectif de ce stage est de faire en sorte que l’étudiant puisse analyser la prise en charge des patients en situation de soin professionnel, hors de l’hôpital. Il peut effectuer des actes seuls, à condition que le médecin soit proche pour assurer la sécurité du patient. Deux à trois maîtres de stage peuvent encadrer l’étudiant, quatre jours par semaine. Le stage de niveau 1 est un préalable au Stage ambulatoire en soins primaires en autonomie supervisée (SASPAP) ou stage de niveau 2. Il se fait actuellement en troisième année d’internat mais avec la réforme, il pourrait avoir lieu en deuxième année. L’étudiant, qui peut faire ce stage chez plusieurs praticiens, réalise des actes en autonomie (interrogatoire, examen, prise de décision, prescription) à condition que le médecin ait vérifié sa capacité à savoir faire. Il s’agit d’un stage professionnalisant mais pas d’un remplacement. 

Rémunération

L’externe et l’interne sont salariés du centre hospitalier auquel leur faculté est rattachée. La rémunération des stages est incluse dans leur rémunération globale. En effet, l’externe perçoit 100 euros par mois en quatrième année, 200 euros en cinquième année et 250 euros en sixième année. Chaque garde est rémunérée 26 euros. L’interne perçoit quant à lui un salaire annuel de 16 000 euros la première année, 18 200 euros la deuxième année et 25 300 euros la troisième année. Il reçoit également des indemnités de logement, de nourriture et de déplacement si jamais son stage est éloigné de sa faculté de référence. Pour les gardes, il perçoit 130 euros. 

Quant au médecin, pour un stage complet d’externe, il reçoit 900 euros - à se répartir entre les maîtres de stage s’ils sont plusieurs. Pour l’interne, le médecin reçoit 3 600 euros, également à se répartir. Avoir un interne est un avantage non négligeable car « si on le trouve compétent et que lui est également satisfait, il peut devenir notre remplaçant, indique le Dr Perdrix. De même que de nombreux internes se sont installés avec leur maître de stage. Personnellement, les quatre associés qui travaillent dans mon cabinet y ont tous été internes. » Et puis pour les praticiens exerçant en ruralité, c’est un moyen de montrer aux jeunes médecins un mode d’exercice, ce qui peut « faire naître des vocations à s’installer ailleurs qu’en ville », conclut-elle.

Le choix du stage

Le choix du stage dépend d’une procédure « codifiée ». Les étudiants disposent d’un rang de classement dépendant de leur résultat aux épreuves classantes nationales (ECN) et des années d’ancienneté au sein de l’internat. Ce sont les facultés, avec les ARS, qui déterminent des choix de stages que les étudiants choisissent en fonction de leur rang de classement et de leurs stages antérieurs.

 

Attention à la rémunération!

Le Syndicat national des enseignants de médecine générale (SNEMG) a attiré l’attention sur la lecture « partisane » et « partielle » qui était faite du décret du 28 juillet 2008 portant dispositions relatives aux personnels enseignants des universités, titulaires et non titulaires de médecine générale. Certains services administratifs des facultés de médecine « sont incités à ne plus rémunérer la maîtrise de stage des enseignants généralistes salariés par la faculté », s’inquiète le SNEMG.

« L’interprétation du décret consiste à dire que comme ces médecins sont salariés pour leur enseignement et leur recherche, ils n’ont pas besoin de l’être lorsqu’ils assurent la maîtrise de stage, dénonce le Dr Anas Taha, président du syndicat. Or, les stages se déroulent lors du temps de soins qui n’est pas rémunéré par la faculté.

Avec une telle interprétation, les facultés pourraient refuser d’indemniser les maîtres de stage. » Pour le SNEMG, « cette interprétation dirigée contre les généralistes universitaires pré-suppose qu’ils sont bons à assumer toutes les tâches sans rémunération. » Le SNEMG demande donc à la ministre de la Santé de mettre un terme à « cette agression ».

par Laure Martin