Cinéma : le médecin face à la maladie de ses proches / L'Ordre des médecins
Quand un médecin se retrouve de « l’autre côté », du côté des patients. La structure, l’ordre qu’il connaît n’est plus.
Bande annonce à découvrir ici.
L’Ordre des médecins (Fiction dramatique)
Sortie 23 janvier
Par Pascal Pistacio, chroniqueur cinéma.
Primum non nocere,
Premièrement ne pas nuire
Tous les médecins connaissent cette devise
Premier plan (fixe) du film : Simon (Jérémie Régnier) est en réunion à l’hôpital où il est pneumologue. L‘équipe débat à propos des patients du service, avec le énième décryptage d’un cas qu’ils suivent depuis des années. Il s’agit de décider si on laisse la personne « s’en aller » dignement chez elle (son mari est épuisé d’avoir eu à s’occuper de sa femme depuis 6 ans) ou si l’on s’acharne, tout en sachant que, dans quelques semaines, la fin est inéluctable. Simon argumente pour arrêter « l’acharnement » thérapeutique.
« Persuader, en médecine, est plus facile que comprendre, mais comprendre est autrement plus urgent et fécond. »
Henri Mondor, 1939
Simon est totalement à l’aise dans l’univers hospitalier qui occupe ses jours et ses nuits.
Dans un CHU, l’usage veut que les plus anciens transmettent leur savoir, leur expérience, aux plus jeunes qui intègrent le service. Riche d’années de pratique, Simon nourrit Agathe (Zita Hanrot) qui ne demande qu’à apprendre, afin de respecter les malades et les accompagner au mieux. Essayer de trouver des solutions, et tant qu’elles ne sont pas trouvées, en dire le moins possible au malade.
« Croire à la médecine serait la suprême folie si n’y pas croire n’en était pas une plus grande encore. »
Marcel Proust, 1918
Un coup de téléphone de sa sœur vient troubler le quotidien de Simon en tant que soignant.
Sa mère (Marthe Keller) a fait un malaise. Simon réagit en professionnel de santé : « qu’elle vienne ici, je vais m’en occuper avec mes collègues… »
Quand sa mère arrive en chaise roulante, il la prend en charge comme il l’aurait fait pour tout autre patient. Il est rassurant, tout va bien se passer, on va faires des analyses et des examens, mais a priori rien d’inquiétant.
Toutefois, les résultats des examens montrent une récidive du cancer pour lequel elle a été opérée des années auparavant. L’attaque de la maladie est violente et le diagnostic plus que réservé.
Malgré les informations que lui donnent ses collègues, Simon veut croire que l’on peut sauver sa mère.
Il se met en congé pour « tout tenter ». Sa mère lui explique alors qu’elle a eu une belle vie et qu’elle accepte de partir. Son mari et ses enfants sont incrédules, abasourdis ; ils tentent de la raisonner, en vain. Simon qui n’a plus sa blouse, protectrice, de médecin, est en proie aux mêmes questionnements que ceux qu’il accompagne depuis des années.
A l’hôpital, avec sa famille, il forme un cocon autour de celle qui se prépare à mourir.
Lors d’une dernière conversation, Simon demande à sa mère : « Pourquoi t’as voulu absolument que je fasse médecine ? », et elle lui répond dans un sourire : « C’est un beau métier non ?»
« Il n’y a rien de si ridicule qu’un médecin qui ne meurt pas de vieillesse. »
Voltaire, 1767
David Roux, pour son premier long-métrage, s’est inspiré de l’histoire de sa famille. Il a pu suivre son frère, pneumologue, à l’hôpital et s’imprégner avec une grande justesse de cet univers clos, ouvert sur l’humanité.
Le chemin escarpé pour arriver à réaliser un premier film dure des années. Son projet, qui ne fait pas exception à la règle, a été toutefois initié, bien avant que les films ayant pour sujet l’univers médical ne se bousculent pas sur les écrans.
Le film L'Ordre des médecins est particulièrement réussi, servi par une distribution magnifique.
Réalisateur et scénario : David Roux
Avec : Jérémie Renier, Marthe Keller, Zita Hanrot, Alain Libolt
Durée : 1h 33
- par Pascal Pistacio