Système de santé : les professionnels attendus pour sa réforme concrète

Invitée le 11 décembre dernier  aux Contrepoints de la santé*, la ministre de la Santé, est revenue sur les points de réforme en cours dans le domaine de la santé.  

par Laure Martin.

LaureMartin

« On a beaucoup reproché au gouvernement de commencer avec des mesures économiques et de prendre tardivement des mesures sociales, a rappelé Agnès Buzyn. Lorsque le président de la République a été élu, nous avions les yeux sur la courbe du chômage. C’était une urgence de relancer l’économie car trois millions de chômeurs, ce n’est pas tenable. » Et de poursuivre : « J’ai décidé de mettre en œuvre les mesures sociales avec une méthode de co-construction. C’est pourquoi elles sont arrivées plus tard. » À titre d’exemple, le plan pauvreté a été travaillé pendant neuf mois dans les territoires. « On ne peut pas reprocher à un gouvernement de ne pas concerter et écouter, et lorsqu’il le fait, lui dire qu’il va trop lentement », estime la ministre.

Répondre aux attentes des Français

Présente le 10 décembre à la consultation du président de la République avec les corps intermédiaires, Agnès Buzyn s’est dit troublée par le fait que les élus citent comme exemple d’abandon des services publics, le manque de médecins. « Les élus considèrent la santé comme un service public. Il y a une urgence absolue. Nous ne pouvons pas nous, pouvoirs publics, professionnels de santé, représentants des grandes fédérations, être sourds au fait que pour les Français, le manque de médecins est significatif d’une absence de l’État. »
La ministre a révélé travailler depuis des mois avec les Ordres des professionnels de santé, car « le système de santé ne répond plus aux attentes des Français. Ce n’est pas en termes de qualité, mais c’est lié à la désorganisation du système ou du manque d’organisation pensée qui nuit au système. » Elle reconnaît avoir refusé la coercition pour l’installation des médecins car avec ce type de mesure, « ce sont les jeunes médecins qui paieraient pour les autres. Or, après environ 12 ans d’études, il n’est pas juste qu’ils soient contraints à l’installation et je pense qu’ils y renonceraient plutôt que d’aller s’installer dans un territoire sans leur famille. »

"Le système de santé ne répond plus aux attentes des Français. Ce n’est pas en termes de qualité, mais c’est lié à la désorganisation du système" Agnès Buzyn

Les Français mitigés sur le système de santé

D’après un sondage BVA pour les Contrepoints de la santé, présenté le 11 décembre, 25 % des sondés s’estiment satisfaits de la prise en charge dont ils ont bénéficié lorsqu’ils ont du avoir recours au système de santé. Mais 65 % dénoncent des problèmes et des dysfonctionnements : 43 % indiquent avoir des problèmes pour obtenir des rendez-vous avec des spécialistes dont 18 % pour l’imagerie. 17 % des Français ont des difficultés à avoir un médecin traitant et 21 % ont des problèmes de prise en charge financière et des difficultés de remboursement. Aujourd’hui, 75 % des sondés considèrent que le système est mal géré.
Face à ces résultats, la ministre a répondu que le défi majeur des pouvoirs publics est de faire face aux attentes des Français alors qu’entre les annonces et la mise en œuvre sur le terrain, il peut se passer entre deux à trois ans. « Il faut mettre en place nos mesures, sinon, nous serons un gouvernement d’annonces », reconnaît-elle. Parmi ces mesures : la mise en place progressive du reste à charge zéro pour l’optique, le dentaire et les prothèses auditives, la structuration des hôpitaux de proximité. « Mon engagement est de veiller à ce qu’aucun hôpital de proximité ne ferme, a fait savoir la ministre. Car si les territoires sont sous dotés en médecins libéraux, voir l’hôpital de proximité fermer, fait encore plus perdre le territoire en attractivité. C’est pourquoi il faut les recentrer sur des missions de proximité. Nous avons besoin de soins de suite, de médecins polyvalents, et de plateaux techniques à minima, c'est-à-dire sans chirurgie. » L’objectif est de renforcer les petits hôpitaux pour les recentrer sur des activités où ils vont rendre un service local. « Nous allons réorganiser le territoire pour que l’hôpital soit réinvesti et attractif », a-t-elle fait savoir.

Les infirmiers attendus

Le sondage BVA indique que pour 63 % des Français, le travail des infirmiers n’est pas assez valorisé. La ministre explique « compter beaucoup sur eux pour la mise en place du Plan santé 2022 ». Pourtant, les infirmiers ont plusieurs fois exprimé leur mécontentement concernant ce qu’ils estiment comme un manque de considération de la part du ministère à l’égard de la profession. Ils regrettent ne pas être mentionnés dans le Plan santé. La ministre s’est justifiée en expliquant ne pas pouvoir citer tous les professionnels de santé concernés… Néanmoins, elle estime que la mise en place concrète des infirmières de pratique avancée est une grande étape à souligner, d’autant plus que ce dispositif est évoqué depuis une dizaine d’années. « Je souhaite que les infirmières accèdent à des missions élargies et la mise en place des pratiques avancées est une vraie reconnaissance de leur travail ».