(c) PHANIE / VOISIN

Assistant médical : un appui pour les médecins libéraux

L’avenant 7 à la convention médicale, signé le 20 juin 2019 avec les syndicats représentatifs des médecins libéraux (1), acte le déploiement de assistants médicaux au sein des cabinets de médecine libérale. Les premières demandes de financement ont débuté en septembre. Le point.

Par Laure Martin.

LaureMartin 

L’objectif entériné avec la création des assistants médicaux est triple :

  • Favoriser un meilleur accès aux soins des patients en faisant en sorte qu’ils aient moins de difficulté à trouver un médecin traitant. Le médecin, épaulé par un assistant médical, peut ainsi se dégager de certaines tâches et se libérer du temps médical. Il pourra donc recevoir davantage de patients.
  • Assurer de meilleures conditions d’exercice puisque le médecin pourra consacrer plus de temps aux soins et au suivi médical de qualité des patients.
  • Rechercher davantage d’efficience, une meilleure prise en charge et un suivi amélioré. En étant engagé dans une démarche de coordination des soins, le médecin pourra plus facilement assurer la coordination et la continuité des soins avec l’ensemble des autres acteurs de la prise en charge de ses patients.

Le rôle varié de l’assistant médical

L’avenant prévoit que le médecin choisisse librement les missions qu’il souhaite confier à l’assistant médical en fonction de sa pratique, de son organisation, de ses besoins propres.

À titre d’exemple, il peut lui confier des missions :

  • administratives : accueil, création/gestion du dossier informatique patient, recueil et enregistrement des informations administratives et médicales, accompagnement de la mise en place de la télémédecine dans le cabinet…
  • en lien avec la consultation : aide au déshabillage, prise de constantes, mise à jour du dossier patient, délivrance de tests de dépistage, préparation et aide à la réalisation d’actes techniques…
  • d’organisation et de coordination notamment avec les autres acteurs intervenant dans la prise en charge des patients.

Le profil

L’assistant médical est une nouvelle fonction en cours de création. Il est accessible aussi bien à des profils soignants, comme les infirmières ou les aides-soignants, qu’à des profils non soignants, comme les secrétaires médicales. Une qualification professionnelle est en cours d’élaboration, mais afin de faciliter la mise en place et les premiers recrutements, elle ne sera pas exigible dans les premières années de fonctionnement du dispositif. L’assistant médical doit en revanche être formé ou s’engager à suivre une formation spécifique dans les deux ans après son recrutement, et avoir obtenu cette qualification professionnelle dans les trois ans.

Un médecin qui dispose d’une secrétaire médicale peut tout à fait lui proposer de devenir son assistante médicale. Néanmoins, il devra remplacer son poste de secrétaire médicale puisque l’assistant médical n’a pas vocation à prendre la place d’un emploi déjà existant.

L’aide financière de l’Assurance maladie

L’aide financière concerne les médecins sur tout le territoire, et pour certaines spécialités sur les 30 % du territoire dont l’offre de soins est insuffisante.

Le médecin doit également :

  • exercer en secteur 1 ou en secteur 2 et être adhérent à l’Optam ou à l’Optam-CO ;
  • exercer en mode regroupé (au moins deux médecins dans un même cabinet), avec une dérogation pour les médecins en zone sous-dense ;
  • s’inscrire dans une démarche d’exercice coordonné, quelle que soit sa forme (maison de santé pluriprofessionnelle, équipe de soins primaire ou spécialisée, communauté professionnelle territoriale de santé…) ou s’engager à le faire dans les deux ans.

Existe-t-il une condition de patientèle ?

Les médecins généralistes doivent avoir un nombre suffisant de patients dont ils sont le médecin traitant  – plus de 640 patients – et, pour les autres spécialistes, avoir vu un certain nombre de patients différents dans l’année.

L’appui d’un assistant médical se justifie à partir d’un certain niveau d’activité, c’est pourquoi les 30 % de médecins ayant les plus faibles patientèles ne sont pas concernés. Pour savoir s’il peut bénéficier d’une dérogation, le médecin peut contacter sa Caisse primaire d’assurance maladie (Cpam).

Quel est le montant de l’aide au recrutement d’un assistant médical ?

Le médecin est accompagné par sa Cpam dans la définition de son besoin et la compréhension des différentes options de financement. Il signe ensuite avec elle un contrat de cinq ans renouvelable, qui formalise les engagements du médecin et de la Cpam. Le financement est annuel, légèrement dégressif en deuxième année, puis pérenne au-delà.

Trois options sont proposées, selon le niveau de financement et d’engagement que le médecin juge approprié à ses besoins et à son organisation.

Les options de financement : deux principales et une spécifique
Participation* de l'Assurance MaladieOption 1 : 1/3 d'assistant médicalOption 2 ; 1/2 d'assistant médicalOption 3 (en zone sous-dense uniquement) : 1 assistant médical
Année 112 000€18 000€36 000€
Année 29 000€13 500€27 000€
Année 37 000€10 500€21 000€

* Des financements majorés sont prévus pour les médecins dont la file active et/ou la patientèle adulte MT est très élevée. Source : Assurance maladie

La contrepartie des médecins

Le médecin reçoit une aide conventionnelle sur toute la durée du contrat. En contrepartie, il s’engage :

  • s’il est généraliste ou spécialiste en médecine générale, à augmenter sa patientèle adulte médecin traitant et sa file active ;
  • s’il est d’une autre spécialité, à augmenter sa file active.

La progression attendue dépend de la taille de la patientèle adulte médecin traitant et/ou de la file active du médecin au moment du recrutement de l’assistant médical. Plus les patientèles MT et file active initiales sont importantes, moins le médecin aura à accueillir de nouveaux patients. Il s’engage à augmenter sa patientèle proportionnellement au niveau de financement qu’il reçoit :

  • option 1 : augmentation de la file active et/ou de la patientèle adulte médecin traitant de + 20 % à 0 % (maintien) ;
  • option 2 : augmentation de + 25 % à 0 % (maintien) ;
  • option 3 : augmentation de + 35 % à + 5 %.

 

Un médecin qui dispose d’une secrétaire médicale peut tout à fait lui proposer de devenir son assistante médicale. Néanmoins, il devra remplacer son poste de secrétaire médicale puisque l’assistant médical n’a pas vocation à prendre la place d’un emploi déjà existant.

Un 3e volet ajouté au forfait structure

Le forfait structure évolue avec l’avenant 7 à la convention médicale. Il intègre désormais un troisième volet, qui formalise l’aide forfaitaire au recrutement d’un assistant médical. Pour en bénéficier, le médecin doit avoir validé les indicateurs prérequis.

En parallèle, l’indicateur « participation à une équipe de soins primaires (ESP), une équipe de soins spécialisés, une MSP, une CPTS, des réunions pluriprofessionnelles ou pluridisciplinaires régulières » est revalorisé et passe de 60 à 120 points, soit de 420 à 840 euros. À compter de 2022, il devient un prérequis.

En outre, un nouvel indicateur optionnel valorise la participation à une organisation proposant la prise en charge de soins non programmés dans le cadre d’une régulation territoriale. Ce nouvel indicateur est valorisé à hauteur de 150 points, soit 1 050 euros.

Ce nouveau forfait structure sera applicable dès 2020 pour un paiement en 2021.

Note

(1) L’avenant 7 a été signé par l’Assurance Maladie et troi des syndicats majoritaires de la profession, MG France, la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) et le Syndicat des médecins libéraux (SML), qui représentent 68 % des généralistes et 55 % des autres spécialités.


Le point de vue des syndicats

Les syndicats représentatifs des médecins libéraux ont participé aux négociations conventionnelles avec l’Assurance maladie pour l’élaboration de l’avenant 7 à la convention médicale. Quel regard portent-ils sur ce nouveau métier ? 

« Au Syndicat des médecins libéraux, nous avons poussé à la mise en place de l’assistant médical car il est inadmissible qu’un médecin, en France, travaille sans aucune aide dans son cabinet, soutient le Dr Philippe Vermesch, président du SML. Dans la plupart des pays, ils sont aidés. Il ne faut pas s’étonner ensuite des nombreux cas de burn out. » Un point de vue partagé par le Dr Jacques Battistoni, président de MG France. « Dans les autres pays, les médecins sont assistés pour l’accueil, la prise de renseignements sur le patient, son état de santé, la partie administrative, explique-t-il. L’assistant apporte son aide au médecin en lui dégageant du temps et en lui permettant d’avoir une consultation plus précise. Il est grand temps que nous puissions en bénéficier en France. »

Le financement

Le SML se dit donc satisfait de l’existence de ce nouveau métier. Le hic : la complexification de la mise en œuvre. « La démarche est bonne mais les médecins la considèrent trop compliquée pour l’obtention du financement, pointe du doigt le Dr Vermesch. Si la consultation était à 45/50 euros, ils pourraient payer eux-mêmes leur assistant médical mais les honoraires sont tellement bloqués que cela ne permet pas au médecin de s’équiper. » L’aide financière devrait selon lui permettre à certains de sauter le pas. Néanmoins, « le financement est partiel, nous pouvons considérer aujourd’hui qu’il s’agit d’un emploi aidé, regrette Jacques Battistoni. Nous aurions aimé un financement plus important, mais après négociations, nous sommes parvenus à un compromis. » « L’avenant 7 est une aide à l’embauche et ce n’est pas parce qu’un médecin ne perçoit pas d’aide financière qu’il ne peut pas embaucher un assistant médical », rappelle le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF).

Objectif : 4000 assistants médicaux d’ici 2022

En septembre, sur l’ensemble du territoire, les Cpam avaient reçu une quarantaine de demandes de financements de poste d’assistant médical de la part des médecins. Un début timide, surtout lorsque que 4 000 assistants médicaux sont attendus d’ici 2022. « Le gros handicap c’est la lisibilité et la complexité de l’avenant, rappelle le Dr Vernesch. De nombreux médecins doivent demander une entrevue avec un délégué de l’Assurance maladie pour savoir s’ils sont éligibles et connaître l’aide dont ils vont pouvoir bénéficier. » « Beaucoup de médecins nous ont dit s’être adressés à leur Cpam et ce sont elles qui ne sont pas prêtes et qui ne disposent pas de toutes les informations nécessaires les concernant pour lancer les financements », indique le Dr Battistoni. « Elles auraient pu mieux anticiper », ajoute Jean-Paul Ortiz.

Autre difficulté signalée : les contreparties attendues par l’Assurance maladie notamment l’augmentation de la file active. Les commissions paritaires départementales permettront de pointer du doigt les circonstances individuelles.

Malgré tout, MG France encourage les médecins à avoir recours aux assistants médicaux « car nous pensons qu’il s’agit vraiment d’une valeur ajoutée à l’exercice de la profession, indique Jacques Battistoni. Ceux qui ont déjà des assistants nous ont affirmé moins ressentir de pression. » « Avoir un assistant médical est un avantage car cela permet une augmentation du temps médical et une meilleure qualité de vie du patient, indique Philippe Vermesch. « Un autre relationnel s’instaure. » « Nous appelons les médecins à avoir recours aux assistants médicaux indépendamment du financement, conclut le Dr Ortiz. Notre idée est de les amener à adopter une logique d’entreprise en embauchant malgré tout des collaborateurs qui vont leur faciliter leur pratique. » 

par Laure Martin - Source : Assurance maladie