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[WEB-SÉRIE #7] SAMU 44 - La nuit, davantage de détresse...

Le SAMU le jour et la nuit : deux mondes opposés. Lors des appels, les patients réagissent différemment en fonction de l'heure. La nuit en particulier, la détresse psychologique se ressent davantage, ce qui complique la prise d'informations des ARM.

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« Aujourd’hui, il y a une différence entre le jour et la nuit, déjà en termes d’intensité d’activité. L’activité des SAMU Centre 15, classiquement, comme beaucoup de centres d’appel d’urgence, est une activité en dos-d’âne, à savoir que vous avez une augmentation de l’activité qui commence vers 8 h 00, midi, puis ça va redescendre un peu pour remonter en fin de journée. Et puis ça va decrescendo à partir de 23 h 00 et sur toute la partie de nuit profonde qu’on est en train de vivre actuellement, puisqu’on arrive sur minuit, ça va redescendre pour bien baisser, et remonter progressivement demain matin aux alentours de 7 h 00 - 8 h 00. Donc, il y a une différence sur le volume d’activité qui est quand même un petit peu moindre la nuit. Après, en termes de nature d’appels, je ne saurais pas finalement dire pour les appels de médecine d’urgence si... Peut-être qu’il y a moins de traumatologie à la nuit profonde, encore que parfois, avec les sorties de discothèques, on peut tout voir. Donc, finalement, pour les appels de médecine d’urgence, il n’y a pas forcément de différence. Par contre, la nuit, on a d’autres types d’appels, plutôt orientés, là, médecine générale, à savoir toutes les pathologies rattachées à la nuit, l’angoisse de la nuit, le besoin de réassurance de certains patients, qui là sont plus importants sur la période de nuit. Sinon, en termes de typologie d’appels, nous, on ne voit pas forcément de différence, en tout cas, ce n’est pas documenté ou ce n’est pas suffisamment bien documenté aujourd’hui.

on traite beaucoup plus de détresses psychologiques et aussi beaucoup d’ivresses [...] Et c’est plus lourd pour avoir les informations, il faut poser davantage de questions pour savoir ce qui se passe, pour savoir répondre


Alors, en termes de rythme de travail, aujourd’hui la régulation médicale doit être postée. Donc on a des temps de repos, mais finalement, lorsqu’on prend les appels, on se lève et on est physiquement prêt à accueillir l’appel. Les périodes de nuit profonde sont physiologiquement difficiles pour tout le monde parce que finalement, on est confronté aux mêmes rythmes, aux mêmes cycles que vous. Donc ça nécessite quand même, pour pouvoir décrocher les appels et avoir un bon niveau d’analyse, d’être physiquement présent derrière son poste parce qu’on a besoin de se mettre en condition pour mieux gérer la fatigue naturelle à laquelle on est tous confrontés à 3 ou 4 heures du matin, là où c’est vraiment les périodes les plus difficiles.

Ce qui fait la différence entre le jour et la nuit, c’est les appels, de par la solitude et la détresse psychologique que cela engendre. La nuit, c’est plus sombre et plus triste, donc les gens sont souvent plus seuls et plus en panique. C’est ce qui fait la différence en matière d’appels, on traite beaucoup plus de détresses psychologiques et aussi beaucoup d’ivresses. Beaucoup, beaucoup d’ivresses chez les jeunes et aussi chez les gens qui ont l’habitude de ce genre de pathologies. C’est plus la nuit qu’ils appellent. Et c’est plus lourd pour avoir les informations, il faut poser davantage de questions pour savoir ce qui se passe, pour savoir répondre à leurs besoins. La nuit, les gens sont tellement en panique quand ils appellent, certains, si vous voulez, c’est plus stressant pour nous, parce qu’on doit en un minimum de temps savoir ce qui se passe, même la journée, et donc du coup, la nuit, les gens ont l’impression qu’on comprend tout de suite les choses. Sauf que non, en fait. Et eux, ils attendent une réponse tout de suite de nous. Un peu comme quand on clique sur internet. Donc, eux, c’est tout de suite. Pour eux, c’est une perte de temps sinon. Alors que la journée, les gens pensent plus à dire bonjour, s’il vous plaît, merci. La nuit, ils sont plus dans la demande d’une réponse immédiate. Voilà en fait la différence. »

Propos recueillis par Carole Ivaldi

par Carole Ivaldi & Guillaume Exer