Institution nationale des Invalides, soigner jusqu'au bout
Discrète à l’ombre de son dôme doré, l’Institution nationale des Invalides (INI), assure la rééducation, la réadaptation et la réhabilitation des grands blessés : blessés militaires ou en uniforme et victimes du terrorisme. Ils bénéficient des meilleurs soins et d’un accompagnement qui durera souvent de longs mois et pour certains toute leur vie. Rencontre avec le médecin général inspecteur Michel Guisset, directeur de l’institution.
Propos recueillis par Laurent Joyeux.
Visionner l'interview du Médecin général inspecteur Michel Guisset directeur de l'Institution nationale des Invalides.
Comment est dirigée l’institution des Invalides ?
Le médecin inspecteur général Michel Guisset : Les invalides ont été édifiés par Louis XIV pour recueillir et soigner les soldats blessés (Edit de 1674). Ce rôle n’a depuis jamais cessé et l’institution nationale des invalides poursuit cette mission. L’institution est dirigée par un Médecin général appartenant au service de Santé des Armées.
Depuis quand occupez-vous ce poste aux Invalides
M.I.G. M. G : C'est tout à fait nouveau puisque je suis aux Invalides depuis un peu plus de deux mois. C'est à la fois un poste, un hôpital et une ville que je découvre.
Quelles étaient vos fonctions auparavant ?
M.I.G. M. G : Auparavant, je dirigeais l'hôpital d'Instruction des Armées Laveran à Marseille, un des huit hôpitaux d'instruction des armées appartenant au service de santé des Armées. C'est un hôpital que je connais bien pour y avoir travaillé en tant que spécialiste pendant longtemps dans le domaine de l'hépato-gastroentérologie, j'ai eu la chance de le diriger pendant presque cinq ans.
Quel public soignez-vous ?
M.I.G. M. G : L'INI est un établissement public administratif qui accueille des militaires blessés en opérations extérieures ou en service. Elle accueille également les blessés qu'on appelle "blessés en uniforme" avec des conventions, notamment avec la police nationale et, depuis deux-trois ans, les blessés d'attentat qui bénéficient aussi du devoir de réparation. L’hôpital est également ouvert aux civils dans le cadre de l'accidentologie.
Quels sont vos projets pour l'Institution des Invalides ?
M.I.G. M. G : L'Institution nationale des Invalides (INI) a un vrai projet d'avenir qui va débuter très rapidement. Ma mission est de l’accompagner. Il s'agit d'un projet de partenariat autour du parcours du blessé avec les deux hôpitaux d'instruction des armées d'île de France que sont l'hôpital Percy à Clamart et l'hôpital Begin à Saint Mandé. Ces deux hôpitaux ont des plateaux techniques et des spécialités qui permettent d'accueillir les blessés arrivant d'opérations extérieures et de les prendre en charge sur le plan médical et sur le plan chirurgical jusqu’à la rééducation qui peut être quelquefois complexe et longue. Il ne s’agit pas simplement de rééducation mais de réhabilitation, de reconstruction et aussi de réinsertion pour le blessé sur un plan professionnel, familial et social. Dans ce sens l'INI va travailler en partenariat avec ces deux hôpitaux militaires pour essayer de trouver pour chaque blessé la meilleure prise en charge et le meilleur parcours de soins.
Ce sont des décisions qui sont prises en équipe ?
M.I.G. M. G : C'est une décision qui a été prise en collaboration avec le Service de santé des armées.
Chaque blessé doit bénéficier d’une prise en charge personnalisée et planifiée, celle-ci sera discutée de façon collégiale, un chef de pôle en assurera la coordination.
Quels types de pathologies ?
M.I.G. M. G : L’INI possède un centre de rééducation et de réhabilitation post-traumatique avec des services de médecine physique et de réadaptation avec médecins rééducateurs, kinésithérapeutes, ergothérapeutes, psychomotriciens, psychologues, neuropsychologues. Toutes ces spécialités concourent à la prise en charge de blessés lourdement atteints avec un plateau technique complet au premier rang desquels des gymnases de rééducation, une balnéothérapie, des ateliers d’ergothérapie.
Et les prothèses ?
M.I.G. M. G : Au sein de l'INI, nous avons le centre de recherche et d'étude pour l’appareillage des handicapés : le CERAH. Il est pour l’instant situé sur deux sites : Créteil et Woippy (en Moselle). Des prothésistes et des chercheurs travaillent ensemble pour adapter les prothèses aux patients, concevoir des appareils spécifiques et se projeter vers les technologies du futur.
Et les pensionnaires ?
M.I.G. M. G :Ce deuxième volet, très important, rejoint l’histoire des Invalides depuis Louis XIV. Nous avons un centre de pensionnaires : ce sont des blessés qui ont servi la France et en ont gardé de lourdes séquelles pour lesquelles ils sont pensionnés. Parmi ces pensionnaires il y a des personnes de tout âge dont certains d’un âge très avancé. Nous avons encore des Compagnons de la Libération, des blessés de la guerre d’Algérie et d’Indochine, des opérations extérieures. Nous les accompagnons le temps qu’il faut. Certains pourront retrouver une autonomie et se réinsérer à l’extérieur mais ils savent qu’à tout moment, ils pourront retrouver ici une prise en charge adaptée.
Y-a-t-il des commissions pour décider qui entre aux Invalides ?
M.I.G. M. G : Tout passe par les professionnels de la rééducation, en l'occurrence nos médecins rééducateurs fonctionnels. Il y a beaucoup de demandes sur l'île de France pour accéder à des centres de rééducation et de réadaptation. Nos médecins vont sélectionner les demandes correspondant à des patients qui peuvent trouver un bénéfice dans notre institution. Ensuite il y a tous les blessés militaires qui relèvent d’un dialogue avec les hôpitaux militaires de Percy et de Begin. C’est un des enjeux du nouveau projet de partenariat.
Les médecins qui travaillent à l'INI sont tous des militaires ?
M.I.G. M. G : Pas tous. Il y a des médecins militaires, des médecins civils sous contrat et également des médecins qui viennent faire des contrats de réserve. Certains médecins sont à temps plein, d’autres à temps partiel comme pour certaines spécialités : la cardiologie, l'ORL ou la dermatologie, des médecins viennent faire des vacations pour faire des consultations ou donner des avis dans les services. Cela est très utile pour nos blessés dont tout déplacement est compliqué.
Combien de temps reste-t-on directeur de l'INI ?
M.I.G. M. G : En général les directions d'hôpitaux, la direction de l'INI, au moins dans le Service de Santé des Armées, sont données à des médecins militaires bien avancés dans leur carrière et qui ont une certaine expérience hospitalière, de chef de service, de directeur médical et c'est toujours pour une mission de trois ans en moyenne.
Donc après les Invalides ?
M.I.G. M. G : Pour ma part cela va coïncider avec ma limite d’âge au sein du service de santé des Armées.
- par Laurent Joyeux