(c) Garo/Phanie

La réforme « Ma santé 2022 » mieux comprise par les jeunes médecins généralistes

Une enquête Ifop (1) pour la Mutuelle des médecins révèle une adhésion très relative des médecins généralistes aux différentes mesures proposées dans la réforme d’Agnès Buzyn. L’adhésion diffère cependant notablement en fonction de l'ancienneté dans la profession. Quel avenir de la médecine ?

par Carole Ivaldi.

Carole Ivaldi

L’intérêt des CPTS et des assistants médicaux peu reconnu

L’enquête met en évidence que 75 % des médecins généralistes interviewés ont mal compris l’intérêt des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Ce nouveau mode d’organisation du système de santé qui permet aux professionnels de santé d’un même territoire de se regrouper autour d’un projet médical spécifique est pourtant l’une des pierres angulaires de la réforme de Agnès Buzyn.  Ainsi, la modification de la carte hospitalière encourageant la concertation entre médecins hospitaliers et médecins libéraux pour soigner les patients est jugée plutôt inefficace par 65 % des médecins généralistes de l’enquête.
Même chose pour  les assistants médicaux, nouveau métier dont le but est de permettre aux médecins de dégager du temps médical supplémentaire et d’encourager les coopérations entre les soignants : un médecin sur deux connait ce dispositif, mais seuls 18 % d’entre eux réunissent les conditions pour être éligibles. Parmi ce faible pourcentage de médecins éligibles, seuls 53 % sont effectivement intéressés par l’embauche d’un assistant médical.

Quels outils paraissent efficaces pour lutter contre les déserts médicaux ?

Parmi une liste de cinq outils, l’assouplissement du numerus clausus et l’augmentation de 20 % du nombre de médecins formés est l’outil jugé le plus efficace pour 71 % des répondants. Assez proches, viennent en deuxième et troisième positions la délégation de certaines tâches médicales (pour 56 %) puis le développement de la télémédecine et de la télé-expertise (pour 52 %). Assez surprenant, l’obligation temporaire d’installation en zone désertée recueille tout de même 41% de votes favorables. En dernière position, loin derrière, l’encouragement à l’automédication n’est un ou outil jugé efficace que pour 10 % des médecins interrogés.

L’ancienneté des médecins pèse sur les avis

Sans surprise, les médecins  ayant plus de 30 ans d’exercice sont nettement plus favorables (78 %) que leurs pairs en début de carrière (58 %) à l’assouplissement du numerus clausus (soit 20 % d’écart). Pareillement, l’obligation temporaire d’installation en zone désertée remporte les suffrages des plus expérimentés (+ 32 % d’écart entre les deux). C’est bien normal puisque ces deux mesures n’engagent que les jeunes médecins et n’ont aucune incidence sur la vie professionnelle des moins jeunes...
En revanche, les médecins ayant plus de 30 ans d’ancienneté sont nettement moins enthousiastes quant à la délégation de certaines tâches médicales (56 contre 71 %) ou au développement de la télémédecine et de la télé-expertise (41 contre 63 %) que les jeunes générations qui sont plus ouvertes aux changements et à l’évolution des métiers de la santé.

Les médecins contre la délégation des tâches aux pharmaciens

À noter : les médecins sondés sont nettement plus favorables à la délégation de certaines tâches médicales aux infirmiers de pratique avancée (60 % y sont favorables) qu’aux pharmaciens (20 % seulement y sont favorables). Dans l’esprit du médecin généraliste, le pharmacien représente davantage une concurrence, car il est prescripteur, contrairement à l’infirmer. Et le type d’actes qui seraient délégués aux infirmiers serait des actes chronophages, tandis que  les actes transférés aux pharmaciens seraient des actes courts, donc plus rentables.

Les médecins sondés sont nettement plus favorables à la délégation de certaines tâches médicales aux infirmiers de pratique avancée (60 %) qu’aux pharmaciens (20 %)

Revoir le paiement à l’acte

Une majorité (55 %) des médecins généralistes ne veut pas d’une remise en cause du principe du paiement à l’acte. Plus les médecins ont de l’ancienneté, plus ils sont attachés au principe du paiement à l’acte : 63 % des médecins ayant plus de 30 ans d’ancienneté sont opposés à la remise en question de ce principe de rémunération, contre 39 % des médecins ayant moins de 15 ans d’ancienneté.
Les  jeunes sont plus favorables aux nouveaux modes de rémunérations comme les structures salariée, mais à condition de gagner au moins 8 300 euros bruts en moyenne par mois.

Note

(1) Méthodologie : l’enquête a été menée auprès d’un échantillon  représentatif de 200 médecins généralistes libéraux. La marge d’erreur de cet échantillon est de 7 % pour  50% de l’échantillon, et de 5,7% pour 25 %. Les interviews ont été réalisées par questionnaire auto-administré en ligne du 29 avril au 14 mai 2019.

par CArole Ivaldi