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Plan Santé 2022 : le patient au cœur du système

Les Contrepoints de la santé, organisés le 19 septembre, au lendemain de la présentation, par le président de la République, de la stratégie nationale de transformation de notre système de santé pour 2022, ont été l’occasion pour des acteurs du secteur, de commenter le plan.

Par Laure Martin

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« On peut se féliciter des approches globales du Plan Santé, qui aborde les finances, l’organisation, la formation, a soutenu Elisabeth Hubert, présidente de la Fédération des établissements d’hospitalisation à domicile (Fnehad), lors des Contrepoints de la santé. Mais après les grandes lignes, après la présentation de la charpente que constituent ces annonces, il faut leur donner du corps, et cela manque un peu. Il va falloir préciser les axes et les actions à conduire. »

La réforme Ma santé 2022, un engagement collectif, est construite autour de trois axes :
-    favoriser la qualité et replacer le patient au cœur du soin,
-    créer un collectif de soins au service des patients,
-    adapter les métiers et les formations aux enjeux de la santé de demain.

La coordination avec les CPTS

Parmi les mesures phares du Plan Santé : mettre en place 1 000 Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) à l’horizon 2022 et 2000 structures d’exercice conventionnées dans les cinq ans. « 1000 CPTS, c’est bien, a assuré Elisabeth Hubert. Mais dans les territoires désertifiés, nous sommes face à des professionnels de santé, qui, après 10 à 12 heures de travail quotidien auprès des patients, ont quelques difficultés à trouver du temps pour se réunir et constituer des CPTS. » Un point de vue partagé par Jean-Paul Ortiz, président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), qui reconnaît la nécessité, pour les professionnels de santé, de mieux se structurer et se coordonner, mais qui rappelle qu’ils n’ont pas été formés au management. « Si on veut que les CPTS se développent, il faut un catalyseur, il faut que les Agences régionales de santé (ARS) jouent pleinement leur rôle de façon à soutenir les acteurs de terrain, et non pas leur donner un cahier des charges de 50 pages. » Selon lui, les médecins prennent conscience de la responsabilité collective territoriale et « nous sommes prêts à l’assumer sur la base d’objectifs collectifs et de moyens mis à disposition », a-t-il ajouté.

Des hôpitaux de proximité

Afin de garantir une prise en charge des patients au plus près de leur territoire, le Plan Santé repense l’organisation hospitalière autour de trois échelons : les soins de proximité (médecine, gériatrie, réadaptation), les soins spécialisés (chirurgie, maternité) et les soins ultra-spécialisés ou plateau technique de pointe.
Ainsi, une nouvelle catégorie d’hôpitaux est créée : les hôpitaux de proximité, dont les premiers devraient être labélisés dès 2020, afin d’atteindre 500 à 600 structures d’ici 2022. Ces établissements, sans service d’urgence ni maternité, assureront des missions hospitalières exclusives à savoir :
-    les activités de médecine polyvalente, soins aux personnes-âgées, soins de suite et de réadaptation,
-    le suivi des maladies chroniques les plus fréquentes,  
-    les consultations avancées de spécialités médicales et chirurgicales avec le support des établissements voisins,
-    des plateaux techniques ouverts aux professionnels de santé de ville ou un accès organisé avec les établissements voisins,  des équipes mobiles de soins, des équipements de télémédecine.
Ces hôpitaux vont permettre le développement de l’exercice mixte entre la ville et l’hôpital. Leur ouverture sur la ville se concrétisera par la participation de représentants des CPTS à leur Commission médicale d’établissement (CME) et à leur conseil de surveillance.
Une telle mesure, « c’est très malin politiquement, a estimé Lamine Gharbi, président de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP). Car les hôpitaux locaux présents dans le paysage hospitalier étaient voués à une fermeture annoncée. Dans le cadre de la réforme, ils sont transformés en centres de premier recours et en hôpital de proximité. Cela donne de la noblesse à ces hôpitaux et le projet inclut les cliniques privées. » Mais pour Jean-Paul Ortiz, hors de question que les hôpitaux de proximité soient les hôpitaux locaux « d’hier ». Si c’est le cas « on a perdu » ! « Les structures hospitalières de proximité doivent être en nombre important, beaucoup plus que les hôpitaux locaux, a-t-il considéré. Elles doivent être le chaînon manquant de notre organisation, entre la ville et l’hôpital, afin que le patient ne fasse plus l’essuie-glace. »

 

Quid de la formation ?
La Plan Santé 2022 prévoit la suppression du numerus clausus dès la rentrée 2020. « Le recrutement des étudiants se fera de façon progressive au cours du premier cycle et à partir de cursus diversifiés. » « Là aussi il faut plus d’explications, a souligné Elisabeth Hubert. Est-ce une licence en santé plus large qui va être mise en place ? Sur ce point, il y a un aspect très politique lié à l’idée qu’on ne peut pas faire autant de gâchis avec les jeunes qui se heurtent à l’échec en fin de première année. » Et d’ajouter : « Si cela doit conduire à l’effet positif de sortir les étudiants, quels qu’ils soient, de l’enceinte unique du CHU et par nécessité, d’élargir les centres de formation au plus près du patient, alors je trouve que c’est un élément intéressant. Mais comment allons-nous gérer ces milliers de personnes ? Je ne suis pas critique mais interrogative. »

par Laure Martin