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Problématiques environnementales : pour une formation plus complète des médecins 

Dans leur cabinet, les professionnels de santé sont de plus en plus confrontés aux questions de leurs patients sur les problématiques environnementales. Pourtant, leur formation dans le domaine est encore limitée. L’Association santé environnement France (Asef) et le syndicat Jeunes médecins, plaident pour davantage de formations dédiées.

Par Laure Martin.

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« En France, nous avons un sérieux problème lié à l’absence d’actions sur la prévention, dénonce le Dr Pierre Souvet, président de l’Asef. Vingt millions de personnes souffrent de maladies chroniques, ce qui coûte deux cents milliards d’euros à la sécurité sociale, sans compter les conséquences sur les emplois et la perte de productivité. »

Pollution de l’air, perturbateurs endocriniens, pesticides sont autant de facteurs de risques de développer des maladies chroniques comme le diabète, le cancer, etc. « Ce matin, à mon cabinet, j’ai pris en charge une patiente diabétique qui a également eu un cancer du sein, raconte le Dr Souvet.  L’interne en stage à mes côtés, lui explique qu’elle doit faire du sport, et éviter de manger trop sucré et trop salé. Mais elle ne l’a pas informée d’éviter les boîtes de conserve alors qu’elles contiennent des substances fortement déconseillées pour les femmes ayant eu un cancer du sein… A l’heure actuelle, beaucoup pensent que si on est malade, c’est par manque de sport ou en raison d’une mauvaise alimentation, alors que les facteurs environnementaux jouent un rôle sur notre santé. Les médecins doivent être formés à cette vision globale de l’individu et faire davantage de prévention. »

L’implication des jeunes médecins

Le syndicat des Jeunes médecins d’Île-de-France a décidé de se saisir de cette problématique et s’est rapproché de l’Asef afin d’agir sur la formation des médecins. « Il est toujours question de refonder le système de santé, alors qu’à la base, il est trop axé sur les soins et pas assez sur la prévention, regrette  le Dr Lamia Kerdjana, présidente du syndicat île de France. Si nous voulons changer de paradigme et faire en sorte que les dépenses de santé diminuent, il faut se centrer sur cette prévention, donc sur l’environnement et la manière que nous avons de l’influer. » Et d’ajouter : « Personnellement, je n’ai jamais eu, au cours de ma formation en santé, des cours sur l’environnement. Il n’est pas normal que des médecins doivent se tourner vers des associations pour obtenir des réponses aux questions que leur posent leurs patients. » Elle estime que si les médecins étaient davantage formés et informés sur les effets de l’environnement sur la santé, ils pourraient répondre plus efficacement aux attentes des patients.

Il n’est pas normal que des médecins doivent se tourner vers des associations pour obtenir des réponses aux questions que leur posent leurs patients sur les perturbateurs endocriniens et les questions de santé environnementale.

Formation initiale et continue

L’Asef souhaite justement agir sur cette formation de tous les professionnels de santé à ces problématiques environnementales. L’association a proposé, dans le cadre du Plan national santé-environnement (PNSE) 4, la création d’un référentiel santé-environnement, avec des cours dispensés par Mooc en quatrième ou cinquième années de médecine ainsi que pour les autres étudiants en santé, avec une validation des acquis. « Nous ne savons pas si notre proposition sera retenue, indique le Dr Souvet. Nous l’espérons car pour nous, la formation initiale est indispensable pour que les futurs soignants connaissent les problématiques en lien avec les perturbateurs endocriniens notamment. » 

L’Asef plaide également pour le déploiement de la formation continue. Une proposition soutenue par le syndicat des Jeunes médecins pour atteindre « les nombreux médecins en exercice », indique le Dr Kerdjana. Pour elle, il serait nécessaire que cette formation continue deviennent obligatoire « pourquoi pas dans le cadre de la recertification ». L’Asef revendique aussi un déploiement plus important des formations en Développement professionnel continu (DPC) autour des problématiques environnementales, encore « rares et insuffisantes ». En attendant, l’association, qui a déjà l’habitude de proposer des formations à destination des professionnels de santé, « nous a proposé d’organiser ensemble des soirées pour nos adhérents », fait savoir le Dr Kerdjana. L’Asef a également élaboré avec l’Union régionale des professionnels de santé (URPS) Médecins Provence-Alpes-Côte d’Azur, un guide « Comment protéger mes patients de la contamination chimique et des perturbateurs endocriniens » à destination des médecins libéraux. « Le professionnel de santé dispose de la confiance du patient, il est le mieux placé pour faire de l’éducation et de la prévention à la santé, estime le Dr Sauvet. Auparavant, les patients ne demandaient rien, alors qu’aujourd’hui, ce sont eux qui posent des questions. Nous devons être capables de leur répondre. »

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par Laure Martin