
#14 À la recherche du système d’enseignement idéal
Mon retour en France a été marqué par une phase de désapprentissage. Je suis retournée suivre des modules d’enseignement n’ayant aucun lien avec mes stages hospitaliers. Je me suis remise à brancarder de temps à autres et j’ai fini par perdre mon autonomie fraîchement acquise dans les dédales de l’hôpital...
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En stage à l’hôpital. À mon co-externe:
- Ça n’est pas possible ! Ce que les étudiants suédois apprennent en 4 ans et demi, on l’apprend en 6 ans ici. J’ai l’impression de régresser, depuis que je suis rentrée de Suède...
- T’exagères pas un peu ?
- Là-bas, au bout de 4 ans et demi, tu es interne et tu as le droit de prescription.
- Ah oui, ça change la donne ! Mais il y a peut-être une raison à ça ?
- J’imagine que le fait d’avoir des cours intégrés au stage doit favoriser l’apprentissage et l’autonomie des étudiants. Et à y réfléchir, ici, quel intérêt aurait l’hôpital à réduire la durée de notre externat ? On brancarde, on range les dossiers, on est de la main d’œuvre pas cher au fond...
- Je ne sais pas. C'est vrai que j’ai rarement eu la sensation d’apprendre mon métier en stage. On est surtout livrés à nous-mêmes. Pourquoi t’es pas restée là bas ?
- En Suède ? Impossible ! C’est un pays trop organisé, trop matérialiste pour moi. Je pensais y trouver l’égalité d’accès aux soins, la solidarité. En réalité, il faut payer cash si tu veux être hospitalisé en urgence, partager les frais d’essence avec l’automobiliste qui te prend en stop, mettre un euro dans la cagnotte si tu veux manger un petit morceau de pain dans le service qui t’accueille. Qu’importe que tu sois un étudiant désargenté. En fait, cette «pseudo égalité», ces règles identiques pour tous nient la réalité des inégalités sociales.
Et poursuivant:
- Les gens ont beau être souriants, je ne me suis jamais sentie aussi seule. Tu ne peux pas dire ce que tu penses sans risquer que cela soit mal pris et que l’on t’ignore ensuite en représailles. Mais pourquoi pas l’Argentine, comme prochaine destination ?
- Quoi, déjà ? Mais tu viens à peine de rentrer...
- Je sais, je sais. Mais les gens ont l’air chaleureux, là bas. J’ai côtoyé pas mal d’Argentins à travers le tango. Et l’Argentine est connue pour son recours à l’art dans les hôpitaux. J’irais bien voir comment cela ce passe.
- De toutes façons, tu ne peux pas repartir avec Erasmus. On a le droit qu’à un séjour à l’étranger.
- Je vais me renseigner. Si ça n’est pas possible, alors je demanderai une dispo.
- Bof, si tu fais ça, tu ne rependras jamais tes études.
- On verra !
C’est comme ça que j’ai donc fait ma demande de mise en disponibilité auprès de la fac de médecine et en parallèle, constitué un dossier "Défi Jeunes" avec comme objectif : partir en Argentine découvrir leur médecine et restituer l’expérience sous forme... de BD !
Sommaire
Billet #01 - Les quatre naissances d’Honorine Cosa
Billet #02 - La 1ère année de médecine : l’anatomie
Billet #03 - La 1ère année de médecine : dans l’amphithéâtre
Billet #05 - Mon premier patient
Billet #06 - La déformation professionnelle
Billet #07 - L’externat ou mon premier stage hospitalier
Billet #08 - Séjour prématuré en maison de retraite
Billet #09 - L’externat ou la vie nocturne
Billet #10 - La Suède ou une société idéale
Billet #11 - Convalescence sur les flots
Billet #13 - Étudier la médecine en Suède
Billet #14 - À la recherche du système d’enseignement idéal
Billet #15 - La pharmacienne et les mots magiques
Billet #16 - La peur et ses remèdes
Billet #17 - Vrai faux départ pour l’Argentine
Billet #18 - L’Argentine ou la rencontre entre l’art et la médecine
- par Honorine Cosa