
#24 : Un quotidien aux couleurs de l’Argentine
Je terminai la 6e année d’externat en reprenant peu à peu mes repères dans mon quartier, sur les bancs de la fac, à l’hôpital et plus généralement, dans ma vie. L’année d’après, les choses sérieuses commenceraient : je serais interne et maître de mes décisions médicales. Ce qui prenait 6 ans en France n’en prenait que 4 en Suède. Et à part désapprendre la médecine en brancardant et rangeant les dossiers médicaux, je ne voyais pas ce que l’on faisait de plus que les étudiants suédois.
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Invitée au festival d’Angoulême à présenter quelques planches de BD, j’allai démarcher les éditeurs, assister à quelques conférences sur les droits d’auteurs, sur comment faire une BD ou comment trouver un éditeur.
Ambre, mon amie d’enfance était également dans les parages et nous flânions ensemble. Moi, j’étais étrangère à ce milieu et elle y était comme un poisson dans l’eau. Elle avait choisi depuis longtemps la vie d’artiste et j’aimais me laisser guider par elle. Ainsi, nous allions au devant de rencontres insolites, d’expositions underground. Je découvrais les fanzines, les ateliers de sérigraphie et de linogravure. L’expérience était telle que j’en oubliais tout de la réalité hospitalière.
L’Argentine me manquait. Là bas, j’avais appris à prendre mes amis dans mes bras et c’était la plus belle découverte que j’y avais faite. J’avais conscience que cette proximité corporelle avait renforcé mes liens d’amitié, tel un catalyseur hyper-puissant, et contribué à mon bien-être. Si bien qu’à mon retour en France, je décidai d’en faire la promotion et d’instaurer les hugs dans mes cercles d’amis proches.
Pour prolonger mon voyage à domicile, je donnais des cours de tango chez moi dans la maisonnette de 42m2 que je louais. Lorsque par chance, une milonga s’organisait dans les environs, je m’y rendais joyeusement et allais y danser une bonne partie de la nuit.
Ainsi, je jonglais entre les stages hospitaliers, le dessin et le tango argentin. J’étais surprise de voir à quel point mon quotidien, à des milliers de kilomètres de l’Argentine, en avait pris les couleurs. J’avais changé et le monde qui m’entourait, avec moi.
Sommaire
Billet #01 - Les quatre naissances d’Honorine Cosa
Billet #02 - La 1ère année de médecine : l’anatomie
Billet #03 - La 1ère année de médecine : dans l’amphithéâtre
Billet #05 - Mon premier patient
Billet #06 - La déformation professionnelle
Billet #07 - L’externat ou mon premier stage hospitalier
Billet #08 - Séjour prématuré en maison de retraite
Billet #09 - L’externat ou la vie nocturne
Billet #10 - La Suède ou une société idéale
Billet #11 - Convalescence sur les flots
Billet #13 - Étudier la médecine en Suède
Billet #14 - À la recherche du système d’enseignement idéal
Billet #15 - La pharmacienne et les mots magiques
Billet #16 - La peur et ses remèdes
Billet #17 - Vrai faux départ pour l’Argentine
Billet #18 - L’Argentine ou la rencontre entre l’art et la médecine
Billet #19 - Mon quotidien à Buenos Aires
Billet #22 - Crise nationale, fin de la parenthèse
Billet #23 - Fin du voyage, début d'un autre dans les méandres de l'hôpital
- par Dr Honorine Cosa